Une recherche norvégienne lève le voile sur le vécu des personnes étudiantes proches aidantes et rappelle l’importance de sensibiliser les acteurs et actrices de l’enseignement supérieur à leur situation.

Dans l’article Does It Matter Who You Provide Care for? Mental Health and Life Satisfaction in Young Adult Carers Associated with Type of Relationship and Illness Category—A National Student Survey, Bente Storm Mowatt Haugland, Mari Hysing et Børge Sivertsen – de l’Université de Bergen, en Norvège – comparent la santé mentale et la satisfaction à l’égard de la vie des personnes proches aidantes aux études à celles qui n’assument pas ce type de responsabilité.

L’impact nuancé de la proche aidance sur la vie étudiante

S’appuyant une revue de la littérature, l’équipe de recherche constate que les études relèvent des impacts à la fois négatifs et positifs découlant de la proche aidance. Par exemple, une recherche réalisée en 2020 auprès d’étudiantes et d’étudiants norvégiens a montré que celles et ceux qui assumaient un rôle de proche aidance souffraient davantage de problèmes de santé mentale, d’insomnie et de troubles somatiques que leurs collègues. Leur satisfaction à l’égard de la vie était également plus faible (Haugland, Hysing, Sivertsen, 2023, p.2).

D’autres études ont en revanche montré certains aspects positifs à la proche aidance pour les jeunes adultes : sentiment de satisfaction envers la vie accru, maturation émotionnelle, épanouissement personnel, meilleure empathie, développement d’une relation significative avec la personne aidée, etc. (ibid, p.3).

Mieux comprendre la réalité des personnes étudiantes proches aidantes

Ce portrait nuancé a conduit l’équipe de recherche à s’intéresser à l’identification des groupes à risques et aux prédicteurs de bien-être chez les étudiantes et étudiants proches aidants.

Pour l’équipe de recherche, il était nécessaire de s’intéresser aux variables liées à la personne soignée (et sa relation avec la personne soignante) et à la maladie traitée.

À partir des données d’une vaste enquête sur la santé et le bien-être étudiant menée par les principales organisations d’aide aux personnes étudiantes, l’équipe de recherche a pu comparer l’état de santé mentale des étudiants et étudiantes assumant un rôle de proche aidance à celui des autres étudiants et étudiantes.

Un échantillon de 37 731 participantes et participants, âgés de 18 à 25 ans, a été retenu aux fins d’analyse. De ce nombre, 2017 personnes (5,4 %) ont indiqué assumer un rôle de proche aidance — 3,4 % le faisant pour un proche parent, 1,8 % pour une personne en dehors de la famille, 0,5 % pour un ou une partenaire et 0,3 % pour une personne parente.

Quelles responsabilités pour les personnes proches aidantes ?

Les personnes soignées souffraient plus principalement de troubles de santé mentale (46,7 %), de toxicomanie ou d’alcoolisme (24, 8%), de troubles du fonctionnement (19,7 %) et de maladies physiques (8,8 %).

Les étudiantes et étudiants proches aidants déclaraient dédier en moyenne 2 h 12 par jour aux soins. Davantage de temps (2 h 55) leur était dédié lorsque la personne aidée était un ou une partenaire .

Santé mentale et satisfaction à l’égard de la vie

Haugland, Hysing, Sivertsen ont ensuite décortiqué le niveau de santé mentale et de satisfaction à l’égard de la vie des étudiantes et étudiants proches aidants en fonction de la relation avec la personne soignée et de la maladie soignée.

Leur analyse a montré que

  • Les problèmes de santé mentale sont plus nombreux et la satisfaction à l’égard de la vie est plus faible chez les personnes étudiantes proches aidantes que chez celles n’ayant pas de responsabilité de soins. (p.7)
  • Les personnes proches aidantes qui s’occupent d’un partenaire présentaient le niveau le plus élevé de problèmes de santé mentale, suivies par les personnes s’occupant d’un parent proche. (p.7)
  • S’occuper d’une personne souffrant de toxicomanie ou d’alcoolisme est associé au niveau le plus élevé de problèmes de santé mentale – et à la plus faible satisfaction à l’égard de la vie – chez la personne aidante. (p.8)

    Retombées pour la pratique

    L’étude a confirmé que les personnes étudiantes assumant une responsabilité de soin sont toutes à risque de vivre des problèmes de santé mentale. L’équipe de recherche estime qu’un soutien doit donc leur être fourni, sans égard à la relation entre la personne soignée et la personne soignante. Une attention particulière devrait être portée aux personnes étudiantes s’occupant d’un partenaire ou d’un parent proche ayant des problèmes de dépendances et/ou de santé mentale.

    Référence

    Haugland, B. S. M., Hysing, M., et Sivertsen, B. (2023). Does it matter who you provide care for? Mental health and life satisfaction in young adult carers associated with type of relationship and illness category—a national student survey. International Journal of Environmental Research and Public Health, 20(5), 3925. https://doi.org/10.3390/ijerph20053925