Malgré la présence de défis de taille, les personnes étudiantes adultes venant poursuivre leurs études aux États-Unis perçoivent positivement leur expérience, selon une récente recherche américaine.

S’installer dans un nouveau pays, naviguer dans un système éducatif inconnu, surmonter les stéréotypes négatifs, apprendre une langue étrangère et, dans certains cas, jongler avec des responsabilités familiales : voilà quelques-uns des défis rencontrés par les étudiantes et les étudiants internationaux adultes. Comment réagissent-ils à ces obstacles ? C’est ce qu’a voulu savoir la chercheuse Yvonne Hunter-Johnson (Southern Illinois University), qui présente les résultats de sa recherche dans un article intitulé A Leap of Academic Faith and Resilience : Nontraditional International Students Pursuing Higher Education in the United States paru dans Journal of International Students.

Des entretiens semi-dirigés ont été menés auprès de personnes étudiantes adultes (n=16) provenant de divers pays et disciplines, et fréquentant huit universités aux États-Unis. Les critères de sélection étaient les suivants :

  • être né·e dans un pays autre que les États-Unis ;
  • étudier en sol américain pendant au moins deux ans ;
  • avoir l’intention de retourner dans son pays d’origine dans les cinq ans suivant l’obtention de son diplôme ;
  • avoir plus de 25 ans au moment de l’obtention de son diplôme.

Les questions qui ont guidé l’analyse de la chercheuse étaient :

– Quelles sont les expériences vécues par ces étudiantes et ces étudiants internationaux en tant qu’adultes poursuivant des études aux États-Unis ?

– Comment ces personnes étudiantes perçoivent-elles les effets de leurs expériences de transition sur leur apprentissage ? (p.285)

Principaux résultats

Le principal thème qui a émergé de l’analyse qualitative des entretiens est l’adaptation au nouvel environnement d’apprentissage du pays d’accueil. Les sous-thèmes sont :

  • la diversité et les différences culturelles dans l’environnement d’apprentissage ;
  • les différences entre l’environnement d’apprentissage du pays d’accueil et celui d’origine ;
  • les barrières linguistiques ;
  • la lutte contre les stéréotypes.

Malgré les obstacles liés à l’adaptation à un nouvel environnement, les personnes participantes ont exprimé un sentiment général positif concernant leur expérience d’études aux États-Unis (p.290).

La diversité et les différences culturelles dans l’environnement d’apprentissage

Image : Canva

La chercheuse rappelle qu’il est documenté que l’inclusion de la population étudiante internationale contribue à la richesse d’un environnement d’apprentissage. Il est aussi reconnu que les différences culturelles découlant de cette diversité entrainent des défis psychosociaux qui peuvent entraver le processus d’apprentissage (p.291).

En effet, les étudiantes et les étudiants internationaux adultes doivent s’adapter à une nouvelle culture éducative. Si plusieurs se sont acclimatés assez rapidement, les défis existent toujours et, dans certains cas, persistent tout au long du séjour. En outre, les accents et les différences linguistiques ont suscité de grandes inquiétudes chez les personnes participantes (ibid.).

Différences entre les environnements d’apprentissage

Les personnes participantes à cette recherche ont unanimement reconnu qu’il existe une grande différence entre le système éducatif américain et celui de leur pays d’origine, notamment en ce qui concerne les programmes d’études, les méthodes et les techniques d’enseignement, ainsi que les processus d’apprentissage et les attentes professorales (ibid.).

Plusieurs ont fait allusion au fait qu’il est plus facile de réussir dans le système éducatif américain que dans celui de leur pays d’origine, entre autres parce que les examens et leur fréquence permettent de se concentrer sur un seul aspect de l’apprentissage à la fois (ibid.).

Les méthodes et les approches d’enseignement privilégiées aux États-Unis peuvent entrainer des problèmes d’adaptation pour des étudiantes et des étudiants internationaux. La discussion animée par la personne enseignante y est une pratique courante. Or, cette méthode d’enseignement représente souvent un défi pour la population étudiante internationale, habituée à un enseignement plus magistral sans discussion (p.292).

Barrières linguistiques

Les personnes participantes ont exprimé des préoccupations concernant les barrières linguistiques. Certaines avaient suivi des cours d’anglais pendant six mois ou plus avant de commencer leur programme d’études. Or, dans certains cas, ces cours n’étaient pas offerts dans leur établissement d’enseignement ni dans le même État, ce qui a nécessité davantage d’adaptation (ibid.).

Apprendre une langue demande beaucoup d’efforts et d’énergie : de nombreuses personnes participantes disent mettre beaucoup de temps à réaliser des travaux écrits, à faire leurs lectures hebdomadaires et à comprendre les discussions en classe. Une participante a affirmé réaliser d’abord son travail dans sa langue maternelle, pour ensuite se rendre au centre d’aide en anglais de son établissement pour s’assurer qu’il est rédigé correctement (p.293).

Dans ce contexte, il peut être difficile pour des étudiantes et des étudiants internationaux de participer à des discussions en classe. Certaines personnes participantes ont affirmé être victimes de préjugés et se sentir incomprises ou stigmatisées à cause de leur accent (ibid.).

Combattre les stéréotypes

Plusieurs personnes participantes ont affirmé être perçues de manière négative et condescendante par le corps enseignant. Elles affirment devoir fournir une « preuve d’excellence » pour montrer qu’elles sont capables de réussir des études supérieures (ibid.).

Elles ont indiqué devoir affronter et surmonter de nombreux stéréotypes, souvent négatifs, associés au fait de venir d’un autre pays que les États-Unis. Selon la chercheuse, il est important de tenir compte de ces difficultés qui peuvent se répercuter sur le processus d’apprentissage (p.294).

Mettre en place un programme de mentorat

Cette recherche met en évidence le rôle majeur du corps enseignant et professoral pour favoriser des environnements d’apprentissage adaptés aux étudiantes et aux étudiants internationaux adultes. Cette population étudiante connait d’énormes défis d’adaptation — tant sur le plan éducationnel que social — qui peuvent avoir des impacts sur la réussite de leurs études (ibid.).

Selon la chercheuse, les établissements d’enseignement supérieur devraient promouvoir une culture institutionnelle qui accueille et soutient les étudiantes et les étudiants internationaux, en particulier ceux et celles qui sont des adultes (p.295).

La mise en œuvre d’un programme de mentorat pourrait avoir des effets bénéfiques en les aidant à s’acclimater aux méthodes d’enseignement et aux environnements d’apprentissage qui ne leur sont pas familiers (ibid.).

Les étudiantes et les étudiants internationaux pourraient être jumelés à deux personnes : l’une provenant des États-Unis et l’autre provenant du même pays/région du monde. La première pourrait les aider à surmonter les obstacles du quotidien, comme se familiariser avec les moyens de transport locaux, identifier les supermarchés, naviguer dans le système éducatif américain, etc. La personne venue du même pays/région du monde pourrait quant à elle offrir son aide dans le processus d’adaptation culturelle (ibid.).

Ces programmes de mentorat par les pairs pourraient devenir un élément clé des ressources offertes par les établissements d’enseignement supérieur et destinées aux étudiantes et aux étudiants internationaux (p.296).

En ce qui concerne les défis d’apprentissage auxquels est confrontée la population étudiante internationale, la chercheuse suggère que les établissements d’enseignement supérieur offrent un programme de soutien à l’apprentissage spécifiquement pour elle. Ces programmes pourraient porter sur les défis linguistiques, la dynamique de la classe et la culture éducative des universités américaines (ibid.).

Enfin, la chercheuse recommande la formation du corps enseignant/professoral aux réalités des étudiantes et des étudiants internationaux. Une telle formation pourrait présenter les meilleures pratiques pour s’assurer que l’environnement de la classe est sensible aux différentes expériences culturelles (ibid.).

Référence

Hunter-Johnson, Y. (2021). A Leap of Academic Faith and Resilience: Nontraditional International Students Pursuing Higher Education in the United States of AmericaJournal of International Students12(2). https://doi.org/10.32674/jis.v12i2.1986