Une récente étude en sciences de l’éducation montre que l'anxiété, la réussite scolaire et les problèmes d'attention à l'école secondaire jouent un rôle important dans les trajectoires d’adaptation, qui sont liées à la persévérance et l'obtention d'un diplôme d'études collégiales.

Dans un article récemment publié dans la revue Research in Higher Education (décembre 2018), les chercheurs Simon Larose, Stéphane Duchesne, David Litalien, Anne-Sophie Denault et Michel Boivin se sont intéressés aux trajectoires d’adaptation des jeunes Québécois lors de leur transition vers le cégep.

Objectifs

L’étude en question, dont Larose est le chercheur principal, conçoit l’adaptation comme un état situationnel qui résulte de l’interaction entre trois dimensions :

  • les caractéristiques individuelles de l’étudiant (par exemple, sa réussite scolaire); 
  • son expérience dans un milieu scolaire et social (par exemple, la qualité du soutien des enseignants et des pairs);
  • les transitions vécues (par exemple, les changements à l’école et dans ses réseaux d’amis).

Source : Larose, S., Duchesne, S., Litalien, D. et al. (2018). Adjustment Trajectories During the College Transition: Types, Personal and Family Antecedents, and Academic Outcomes. Research in Higher Education, décembre. https://doi.org/10.1007/s11162-018-9538-7

Les objectifs globaux de l’étude sont donc : 1) d’obtenir un portrait détaillé de la transition vers le cégep grâce à un échantillon aléatoire d’étudiants québécois; 2) d’identifier les antécédents – personnels et familiaux – et les influences du système d’éducation sur les résultats scolaires ultérieurs. En effet, aucune étude à ce jour n’avait examiné les relations prédictives entre les trajectoires d’adaptation au cours de la transition vers le cégep et la qualité de la formation scolaire subséquente des jeunes.

Adaptation émotionnelle

Selon l’étude, la grande majorité des étudiants qui ont connu des problèmes d’adaptation sociale et émotionnelle au cégep avaient déjà connu des niveaux comparables de problèmes à l’école secondaire. Ces résultats suggèrent davantage de continuité que de discontinuité dans la capacité des jeunes à s’adapter lors de la transition collégiale, du moins en termes d’adaptation sociale et émotionnelle.

Les résultats montrent aussi que l’adaptation sociale et émotionnelle lors de la transition vers un collège est davantage influencée par des processus individuels stables (par exemple, les traits de personnalité) que par des processus d’apprentissage ou sociaux liés à des aspects particuliers de l’environnement (par exemple, changer d’école ou de groupes d’amis).

L’une des conclusions importantes de l’étude concerne l’anxiété : celle-ci explique la plus grande partie de la variance de l’adaptation émotionnelle et sociale, tandis que le fait de quitter la maison pour fréquenter le cégep et le soutien parental au long du cheminement scolaire expliquent très peu de choses.

Adaptation scolaire

Les résultats ont été très différents pour ce qui est de l’adaptation scolaire, soit la capacité du jeune à faire face aux diverses exigences de l’expérience scolaire comme les examens,les habitudes d’étude, l’assiduité en classe ou la gestion du temps. La grande majorité des étudiants qui ont fait état d’une adaptation élevée ou modérée pendant leur quatrième année du secondaire ont signalé une baisse de l’adaptation scolaire entre la quatrième année du secondaire et la deuxième année du collégial.

Pourquoi l’adaptation scolaire commence à décliner en cinquième année du secondaire? Larose et ses collègues soutiennent que les jeunes seraient déjà, sur le plan cognitif, dans une transition avant d’entamer une véritable transition scolaire, notamment en raison des examens ministériels de quatrième secondaire.

Antécédents personnels et familiaux 

L’anxiété jouerait un rôle prépondérant dans l’explication des trajectoires d’adaptation. Plus l’anxiété était grande au secondaire, plus les jeunes appartenaient à des trajectoires à risque sur les plans affectif, social et scolaire.

L’anxiété est donc le facteur déterminant qui expliquerait la plus grande partie des variations des trajectoires émotionnelles, sociales et d’adaptation scolaire.

Outre l’anxiété, les résultats montrent que la réussite scolaire et les problèmes d’attention au secondaire constituent des déterminants majeurs des trajectoires d’adaptation. Ces conclusions appellent à une action proactive pour aider les jeunes à maîtriser leurs émotions et à gérer leur attention bien avant qu’ils franchissent les portes du cégep.

Implications pour la pratique

Les chercheurs soulignent la nécessité pour les collèges d’investir dans des programmes et mesures préventives universelles conçues pour rendre l’expérience de transition vers le cégep plus confortable et constructive pour les étudiants.

Les résultats suggèrent également que les écoles secondaires et les cégeps harmonisent leurs efforts universels de prévention. En effet, le processus de transition semble commencer dans l’esprit des étudiants bien avant qu’ils n’entrent au collège.

À la lumière des résultats, les interventions devraient porter sur les croyances erronées des jeunes au sujet de l’éducation collégiale et de l’éducation postsecondaire, dans le but de diminuer l’anxiété et de leur donner les moyens de mieux la vivre.