La chercheuse Paula Arriagada signe l’article « Les réalisations, les expériences et les résultats sur le marché du travail des femmes des Premières Nations, métisses et inuites titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur ». Des données révélatrices d'enjeux vécus par les femmes autochtones dans leurs parcours scolaires et professionnels ressortent de cette recherche.

Publié dans la revue Regards sur la société canadienne de Statistique Canada, l’article contient des données démontrant l’écart persistant entre les niveaux de scolarité entre les Autochtones et la population non autochtone. La recherche révèle aussi les défis de mobilité géographique de certain·es étudiant·es autochtones qui peuvent influer sur leur accessibilité aux études. Selon l’autrice, le profil démographique particulier des différentes communautés autochtones (étudiant·es plus âgé·es, responsabilité parentale, traumatismes intergénérationnels, etc.) exige des mesures de soutien spécifiques.

Méthodologie

L’échantillon privilégié dans la recherche concerne les femmes autochtones âgées de 25 à 64 ans. Précisément, leur niveau de scolarité et leurs résultats sur le marché du travail sont dans la mire de la chercheuse. De plus, la recherche comprend autant les Indien·nes inscrit·es que les non-inscrit·es dans le terme « Premières Nations ». Concernant les sources, l’étude s’appuie sur le recoupement de plusieurs données :

Cela dit, afin de rendre les analyses plus signifiantes, les données sur les femmes autochtones sont comparées à celles de non-Autochtones. Les variations à l’intérieur des différentes identités autochtones sont également examinées, de même que celles relatives au genre.

Quelques faits saillants de l’étude

• « La moitié des femmes autochtones détenaient un titre d’études postsecondaires en 2016 (p. 3);

• La proportion de femmes autochtones titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur a augmenté de 2006 à 2016 (p. 4);

• L’enseignement est un domaine d’études courant chez les femmes autochtones titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur (p. 6);

• Les prêts étudiants gouvernementaux représentent la source de financement la plus courante pour les études postsecondaires (p. 8);

• Près du quart des femmes autochtones vivant hors réserve titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur ont participé à des activités conçues pour aider les étudiants autochtones à réussir (p. 10);

• Les femmes autochtones tendent à obtenir leur diplôme à un âge plus avancé que les femmes non autochtones (p. 10);

• La majorité des femmes autochtones ayant obtenu un baccalauréat ou un diplôme de niveau supérieur en 2015 occupaient un emploi en 2018 (p. 11);

• Environ 7 femmes autochtones sur 10 titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur avaient une entreprise ou un emploi étroitement lié à leur domaine d’études (p. 12). »

Arriagada (2021)

Facteurs influençant le parcours scolaire

Image d’une femme autochtone : Canva

L’autrice situe sa recherche dans le contexte des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Selon elle, il est important de « comprendre les facteurs qui influent sur la fréquentation et la réussite scolaires des Autochtones » (ibid., p. 2).

Parmi les obstacles auxquels sont confrontés les Autochtones dans leur parcours scolaire, Arriagada identifie des problèmes d’accessibilité aux études postsecondaires, notamment :

• la nécessité de déménager;

• une orientation scolaire insuffisante;

• un manque de programmes culturellement adaptés;

• des ressources financières inadéquates;

• l’incidence des traumatismes intergénérationnels.

D’après Inuit Tapiriit Kanatami (2020), Gaywish et Mordoch (2018) et Bougie et coll. (2013), cités dans Arriagada (2021)

Pistes de recherche et d’action

La chercheuse propose des pistes pour accroitre l’accessibilité aux études et la réussite éducative des femmes autochtones :

  • participer à des ateliers d’aide à la réussite scolaire;
  • offrir des services de garde d’enfant « abordables et culturellement adaptés » à la population autochtone étudiante souvent plus âgée et assumant souvent des responsabilités parentales;
  • proposer des mesures de soutien adaptées à des étudiant·es plus âgé·es (Arriagada, 2021, p. 13).

Arriagada propose aux équipes de recherche intéressées par ce sujet de sonder, par exemple, « les professions et la rémunération selon les titres d’études plus détaillés, y compris les diplômes inférieurs au baccalauréat » (ibid.). Elle souligne le besoin de brosser « un portrait plus complet des avantages que confèrent les études postsecondaires et de l’emploi chez les femmes autochtones » (ibid.). Les équipes de recherche devraient se demander pourquoi les Autochtones sont sous-représentés dans les études postsecondaires.

En somme, les analyses présentées dans l’article peuvent servir à concevoir des programmes qui répondent mieux aux besoins et aux défis des femmes autochtones, selon Arriagada. Les décideurs peuvent aussi s’en inspirer pour proposer des politiques publiques ou des mesures de soutien adaptées à cette population. Si le niveau de scolarité de la population canadienne en général a augmenté depuis 20 ans, les femmes autochtones demeurent sous-représentées dans les études postsecondaires.

À noter que cette recherche a été financée par Femmes et Égalité des genres Canada (FEGC).

Pour aller plus loin

Pour approfondir le thème des services d’aide à la réussite pour les Autochtones, consultez le dossier CAPRES (2018) sur les étudiant·es des Premiers Peuples en enseignement supérieur, notamment la pratique inspirante « Les services aux étudiant·es autochtones, le cœur du Centre des Premières Nations Nikanite ».

Pour des témoignages d’étudiant·es autochtones concernant les défis et les enjeux qui parsèment leurs parcours en enseignement supérieur, consultez les article du CAPRES sur le sujet.

Sources : Arriagada, P. (2021). Les réalisations, les expériences et les résultats sur le marché du travail des femmes des Premières Nations, métisses et inuites titulaires d’un baccalauréat ou d’un diplôme de niveau supérieur. Regards sur la société canadienne. Ottawa : Statistique Canada, 20 p.

Inuit Tapiriit Kanatami (2020). Inuit Post-Secondary Education Strategy, Raising Education Attainment Rates, Ottawa. 20 p. [disponible en français]

Gaywish, R, et Mordoch, E. (2018) « Situating intergenerational trauma in the educational journey », In Education, 24(2).

Bougie, E., Kelly-Scott, K. et Arriagada, P. (2013). Expériences au chapitre de l’éducation et de l’emploi des Premières Nations vivant hors réserve, des Inuits et des Métis : certains résultats de l’Enquête auprès des peuples autochtones de 2012. Ottawa : Statistique Canada.