Christa Bialka, professeure-chercheure à l'Université Villanova (Pennsylvanie), examine le phénomène d'exclusion des étudiants en situation d'handicap (ÉSH) dans les collèges, en particulier par les autres étudiants. Dans un récent article paru dans The Conversation, un média numérique indépendant portant sur l’enseignement supérieur, la chercheuse évoque un récent cas d’exclusion par les pairs d’une étudiante handicapée.

Discours et réalité

L’étudiante AnnCatherine Heigl a tenté, en vain, de se joindre aux huit « sororités » (associations étudiantes typiquement américaines) de son école. Les huit l’ont rejetée. AnnCatherine a un handicap, le syndrome de Down. Selon la chercheure, son cas n’est pas isolé, malgré le discours d’ouverture et d’inclusion des établissements postsecondaires. En effet, les collèges et les universités n’ont qu’un contrôle limité sur les associations et groupes dirigés par les étudiants. L’expérience d’AnnCatherine confirme qu’il est important de tenir compte de la façon dont les handicaps sont perçus par l’ensemble de la communauté collégiale et universitaire.

L’exclusion par les pairs

Une étude de Sachs et Schreuer (2011) montre que les ÉSH participent à moins d’activités parascolaires et d’événements sur le campus que leurs pairs non handicapés. Selon cette étude, cette plus faible participation à des activités est due à un manque d’inclusion sociale. Elle découle aussi du fait que de nombreux programmes collégiaux et universitaires mettent l’accent sur l’accessibilité scolaire et physique, tandis que la participation sociale des ÉSH reçoit moins d’attention. Étant donné que de nombreuses activités parascolaires sont dirigées et organisées par les étudiants, les ÉSH peuvent en être exclus sans que les conseillers des services aux étudiants en soient informés. L’auteure Christa Bialka rappelle que les ÉSH des collèges sont également plus susceptibles d’abandonner l’école que leurs pairs non handicapés. Elle s’appuie sur le rapport de Newman et al. (2011) selon lequel seulement 34 % d’entre eux terminent un programme de quatre ans, contre 51 % de leurs pairs non handicapés. Comment alors les collèges et les universités peuvent-ils devenir plus inclusifs ?

Source : Noun Project

Voies d’inclusion

La chercheure présente quelques suggestions pour inclure davantage les ÉSH dans les collèges.

1. Commencer tôt

Les enseignants du primaire et du secondaire devraient, selon la chercheure, acquérir les compétences nécessaires pour parler des handicaps dans leurs classes. Cela peut se faire en intégrant de la littérature qui met en scène des enfants handicapés ou en enseignant le mouvement des droits des personnes handicapées, par exemple. Une sensibilisation à un jeune âge peut ainsi contribuer à réduire les maladresses et l’évitement envers les ÉSH.

2. Éviter la rhétorique sur le handicap

Selon la chercheure, il est fréquent d’employer une « rhétorique sur le handicap » qui présente les personnes handicapées comme une source d’inspiration. Or, ce genre de discours peut renforcer l’idée selon laquelle les personnes handicapées sont incapables de réussir. En effet, lorsque l’on dit qu’une personne peut réussir « malgré » son handicap, cela fait du handicap quelque chose que seules les personnes fortes réussissent à surmonter – les plus faibles « vivant avec ».

3. Favoriser les possibilités d’inclusion

Les associations et groupes de personnes handicapées sur le campus peuvent accroître la sensibilisation au handicap, promouvoir l’inclusion et créer des occasions pour tous les étudiants de participer à des activités sociales.

4. Intégrer le handicap dans la diversité

De nombreux collèges et universités ont récemment adopté des initiatives en matière de diversité. Cependant, les personnes handicapées n’en font pas toujours partie. Une étude récente (Gabel et al., 2016) montre que 66 % des sites web des universités d’État de Californie (CSU) contenaient peu d’information sur les handicaps sur les pages d’accueil, qui sont pourtant le « visage virtuel de l’université ». Les représentations du handicap sont importantes pour que les ÉSH se sentent les bienvenus sur les campus, de la même façon que les images de diversité raciale ou de genre sont utilisées pour attirer des étudiants.

Handicaps invisibles, barrières invisibles

Les collèges et universités ont repensé l’accessibilité physique des campus. Or, selon Bialka, les barrières sont physiques, mais aussi sociales et se manifestent dans l’exclusion, les préjugés, la pitié, la glorification, etc. De plus, il faut tenir compte du fait que les ÉSH ont parfois un handicap invisible comme les troubles d’apprentissage ou l’autisme. Bien qu’il n’existe pas de solution simple pour enrayer à l’exclusion des ÉSH dans l’enseignement supérieur, il est toutefois possible d’augmenter leur inclusion dans les collèges et les universités, en offrant des ressources, une éducation et des expériences étudiantes qui incluent les étudiants handicapés. Accéder à l’article paru dans The Conversation (en anglais)