Les investissements pour doter les classes de nouvelles technologies ont été très importants au fil des dernières années. Cela plaît beaucoup aux étudiants actuels qui se considèrent eux-mêmes comme étant des "natifs du numérique". Mais sur le plan de l’apprentissage, est-ce qu’une amélioration a pu être constatée depuis cette poussée technologique? Dans un texte paru sur The Conversation, Patricia A. Alexander (professeure de psychologie à la University of Maryland) et Lauren Singer Trakhman (étudiantes au doctorat à la même université) soutiennent que ce n’est pas le cas. Les enseignants, tout comme les parents et les législateurs constatent bien l’influence croissante des nouvelles technologies et la familiarité avec laquelle les étudiants les manies. Ils ont donc réagi en conséquence. Un nombre croissant de salles de cours sont maintenant dotées de tablettes électroniques ou de manuels numériques. Pourtant, la familiarité des étudiants avec ces nouveaux outils ne se traduit pas en de meilleures performances académiques. C’est ce qu’ont constaté les auteurs en comparant les résultats obtenus avec ces outils numériques et ceux obtenus avec des textes imprimés.

Ce que les étudiants croient et ce qui est observé

Alors que les étudiants croient mieux apprendre par le biais de médias numériques, les recherches menées par les auteurs indiquent plutôt que leur performance serait affectée de façon négative. Par exemple, Alexander et Singer Trakhman ont constaté que dans le cas de textes de plus d’une page, les étudiants comprenaient mieux l’information sur support imprimé. Selon elles, le fait de devoir faire défiler le texte (scrolling) nuirait à la concentration. Afin de valider cette hypothèse, les auteurs ont mené trois études portant sur la compréhension de texte en comparant le support numérique et le support papier. Les principaux résultats obtenus sont les suivants :
  • Les étudiants ont une préférence marquée pour la lecture sur support numérique.
  • La lecture était plus rapide en ligne que sur papier, et ce, de façon significative.
  • Les étudiants jugent leur compréhension en ligne meilleure.
  • Paradoxalement, la compréhension sur papier s’est révélée meilleure que sur support numérique.
  • Le médium n’a pas d’influence sur la compréhension de l’idée centrale du texte.
  • Quand il s’agit de questions spécifiques, la compréhension est nettement meilleure sur papier.

Quelles sont les leçons à tirer?

  1. Prendre en considération l’objectif. Il faut savoir qu’en matière de lecture, il n’y a pas un médium qui offre un meilleur résultat pour tous les types de tâches.
  2. Analyser la tâche. Un des principaux résultats obtenus par les auteurs est que, pour certaines tâches, le type de médium n’a aucune incidence. Toutefois, quand il s’agit d’avoir une compréhension approfondie d’un texte, le texte imprimé est préférable. Ainsi, les professeurs devraient rappeler aux étudiants que le choix du médium peut avoir une influence sur la compréhension.
  3. Ralentir la vitesse de lecture. Le problème avec la lecture en ligne est qu’elle est souvent plus rapide et que les lecteurs ont tendance à sauter des lignes. Il est possible de modifier cette tendance néfaste et ainsi de favoriser une meilleure compréhension même sur un support numérique.
  4. Il y a plus que les raisons économiques et environnementales. Ce serait une perte de rejeter le format papier en ne se basant que sur ces deux raisons. Il est difficile d’imaginer un niveau d’engagement similaire pour les deux supports. Pour l’heure, celui qu’on observe avec le papier est beaucoup plus important.
En somme, l’abandon de l’imprimé pourrait avoir des conséquences néfastes pour l’apprentissage et le développement académique. Les coûts sont difficiles à estimer, mais bien réels.   Pour accéder directement à l’article de The Conversation