Une thèse présentée à la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université d'Ottawa en janvier 2017 porte sur les expériences étudiantes des immigrants de première génération inscrits au collégial ontarien. Dans sa recherche, l'auteur tente de comprendre leur processus d’intégration sociale et scolaire au milieu francophone en situation minoritaire en Ontario. La thèse rédigée par Lynnda Proulx s’inscrit dans le contexte où de nombreux nouveaux immigrants au Canada ayant entre 15 et 44 ans démontrent un intérêt pour les études postsecondaire. Toutefois, on note également que leur niveau de performance scolaire est moins élevé que la moyenne des étudiants natifs du Canada. Les multiples obstacles auxquels font face ces étudiants (linguistique, scolaire, socioculturel, etc.) augmentent les risques de décrochage. Et pourtant, de nombreuses histoires de succès sont observables.

Les expériences étudiantes d’intégration sociale et scolaire réussie

«Quelles expériences étudiantes d’intégration sociale et scolaire réussie vivent les étudiants immigrants de première génération au collégial en milieu scolaire francophone minoritaire en Ontario ?» Voilà la question au coeur de la thèse de Lynnda Proulx. Le but de cette dernière est de mieux comprendre comment les étudiants immigrants de première génération définissent une intégration réussie au milieu scolaire francophone en situation minoritaire. Elle veut également savoir quels processus d’intégration ceux-ci visent. Enfin, elle tente d’en savoir plus sur leur apport à la communauté scolaire et sociale francophone à laquelle ils appartiennent.

Cinq concepts centraux

Cinq grands concepts composent le cadre d’analyse de Mme Proulx :
  • L’intégration scolaire
  • L’intégration sociale
  • Le métier d’étudiant
  • L’expérience étudiante
  • La représentation sociale

Approche phénoménologique

L’auteur de la recherche a conduit des entretiens semi-dirigés auprès d’une quinzaine d’étudiants immigrants âgés de 20 à 39 ans et inscrits dans un programme technique d’une institution d’enseignement collégial d’Ottawa. Des entretiens de groupe ont aussi été organisés.

Les résultats

Mme Proulx conclut au terme de son travail que le processus d’intégration scolaire et le processus d’intégration sociale sont deux processus globaux interdépendants, ce qui l’a mené à composer un seul processus réunissant les deux. L’ensemble de l’analyse de l’auteur lui a permis de tirer quelques constats :
  • «La formation de groupes d’étude constitue un apport important dans les stratégies de réussite des étudiants issus de l’immigration.
  • Les compétences scolaires de l’étudiant immigrant constituent des ressources qui lui permettent d’établir des relations sociales utiles.
  • Le milieu étudiant au sein d’un établissement postsecondaire est caractérisé par un comportement manifeste chez les individus (tant chez les Canadiens que chez les immigrants) qui tend au cloisonnement dans leur propre culture et par la méconnaissance des autres cultures.
  • Puisque plusieurs étudiants immigrants de première génération se sont engagés comme représentant de classe et comme tuteur pour différentes matières dès la première année scolaire, nous réalisons qu’ils peuvent s’engager rapidement au milieu d’accueil à condition de poser des stratégies relationnelles envers ses pairs.
  • Lorsqu’entouré de personnes qui donnent de l’appui, il apparaît que l’étudiant issu de l’immigration qui réussit nécessite quelques mois d’observation en classe avant de commencer à s’ouvrir et à accepter l’appui offert, ce qui semble lui permettre de surmonter plus rapidement les obstacles d’ordre scolaire et social et faciliter son processus d’intégration au milieu.
  • La situation de la minorité francophone et ses effets restent méconnus chez les répondants de cette recherche; ils réalisent leur situation comme minorité ethnique ou visible, mais peu d’entre eux peuvent se représenter la situation de minorité linguistique reliée au français.
  • Par ses programmes de stages, son appui à la recherche d’emploi, l’établissement postsecondaire s’avère un instrument clé qui lie la formation et la construction de l’expérience de travail canadienne, favorisant ainsi l’avenir professionnel de l’étudiant». (p.229)

Des pistes d’intervention

Lynnda Proulx, au terme de sa thèse, en se basant sur les propos de ses répondants, énonce quelques pistes d’intervention afin de répondre aux besoins des immigrants de première génération et faciliter leur intégration scolaire et sociale :
  • Plan d’encadrement des étudiants issus de l’immigration. Ce plan viserait à pallier les lacunes en matière de concertation et de planification de l’encadrement de ce groupe d’étudiants.
  • Programme de mentorat. Une équipe composée de 4 à 6 personnes en mesure d’appuyer individuellement les étudiants issus de l’immigration devrait être constituée. Il faudrait également développer des mécanismes permanents de mentorat dont la base serait une présence physique et non virtuelle.
  • Centrale d’information. Cette centrale d’information ne devrait pas être informatisée, mais formée de personnes qui peuvent répondre aux questions et diriger les individus vers des solutions, des réponses concrètes et rapides.
  • Groupe d’entraide. Un réseau multiculturel entre nouveaux arrivants provenant de l’Afrique pourrait être mis en place.
  • Centre de développement d’expérience professionnelle canadienne. Ce centre devrait permettre aux étudiants de développer leur expérience professionnelle canadienne, notamment en s’assurant que les stages prévus au programme auront bel et bien lieu, comme prévu. D’autres mécanismes pourraient également être développés pour offrir des expériences pratiques en milieu de travail (bénévolat, programmes étude-travail, stages, etc.).