Trois chercheuses de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) examinent l’utilisation des services de soutien et des mesures d'accommodement chez les étudiant·es ayant un trouble du déficit de l’attention avec/sans hyperactivité (TDAH), de même que leurs perceptions d’efficacité de ces ressources.

Dans un article paru dans la Revue canadienne de l’éducation (2022), Jeanne Lagacé-Leblanc, Line Massé et Nadia Rousseau présentent les résultats d’une recherche qualitative menée auprès de 29 étudiant·es de collèges et d’universités du Québec ayant reçu un diagnostic de TDAH.

Plusieurs participant·es présentent au moins un trouble en comorbidité avec le TDAH : 43 % un trouble d’anxiété et 36 % un trouble d’apprentissage. Près de 83 % des participant·es prennent une médication pour le TDAH.

Vingt participant·es ont également un plan d’intervention actif leur permettant de bénéficier d’accommodements.

Principaux résultats

Les étudiant·es ont été interrogé·es sur leur utilisation et leur perception des services de soutien de leur établissement.

L’utilisation des services adaptés

Celles et ceux qui n’utilisent pas les services adaptés évoquent plusieurs raisons derrière ce choix, notamment :

  • le souhait de réussir seul·es ;
  • le refus d’un avantage par rapport aux autres étudiant·es;
  • le refus de demander de l’aide qui ne sera pas offerte sur le marché du travail;
  • le fait de ne pas ressentir le besoin de bénéficier d’accommodements;
  • le fait d’avoir du mal à accepter leur TDAH.

Les résultats de la recherche montrent également des capacités d’autodétermination chez certain·es étudiant·es qui régulent leurs comportements et possèdent une volonté de recourir à d’autres moyens de manière indépendante (p.266).

La perception d’utilité des services adaptés

Image : Canva

Dans l’ensemble, les participant·es jugent que les services adaptés sont utiles, que ce soit pour les aider à faire moins de fautes d’orthographe, à gérer leur temps, à comprendre les lectures ou à gérer le stress lié aux examens.

Toutefois, les chercheuses notent que les services de soutien restent peu utilisés par les étudiant·es interrogé·es. Selon elles :

Les résultats de la présente étude montrent que les services ne répondent pas aux besoins de certaines populations étudiantes, notamment parce qu’elles n’ont pas de difficultés spécifiques ou parce qu’elles ont développé des stratégies personnelles (p.277).

Le personnel des services aux ÉSH pourrait s’interroger sur les types de services offerts et sur les meilleurs moyens de favoriser la participation d’un plus grand nombre d’étudiant·es, notamment en réalisant des consultations auprès des étudiant·es ayant un TDAH (p.277).

Quels sont les obstacles rencontrés ?

Les participant·es de l’étude relèvent plusieurs obstacles dans la mise en œuvre de mesures, qui exacerberaient les symptômes du TDAH au lieu de les diminuer. Voici quelques mesures qui ne font pas l’unanimité chez les participant·es :

  • la question du local adapté

Considérant que plusieurs étudiant·es perçoivent cette mesure comme inefficace, les chercheuses suggèrent que les établissements proposent d’autres services ou mesures d’accommodement avant de proposer le local adapté, et de l’offrir seulement aux étudiant·es ayant d’importants besoins ou pour qui d’autres mesures n’ont pas eu les effets escomptés (p.268).

Les étudiant·es devraient être parties prenantes des choix des accommodements à leur plan d’intervention, afin que ceux-ci répondent à leurs besoins (p.268).

  • le temps supplémentaire

L’utilisation du temps supplémentaire pour les examens apparait utile lors des examens contenant des questions à développement, car les étudiant·es semblent rencontrer davantage de problèmes lors de ces situations d’évaluation.

Selon les chercheuses, ces résultats montrent la pertinence de s’interroger sur les besoins inhérents à l’utilisation du temps supplémentaire et d’évaluer si d’autres services d’aide ne seraient pas plus adéquats dans certaines situations (p.269).

  • l’enregistrement des cours

Certains accommodements, comme l’enregistrement de cours, sont perçus comme inefficaces, car ils exigent de l’étudiant·e des compétences en gestion de temps ainsi qu’une motivation à persévérer dans son utilisation. Selon les chercheuses, les accommodements devraient tenir compte des difficultés fonctionnelles et être plutôt simples pour favoriser leur adaptation (p.269).

  • le service de prise de notes

La lourdeur associée à certains accommodements, comme le service de prise de notes, peut expliquer leur faible utilisation par les étudiant·es. L’étude apporte quelques réponses intéressantes pour expliquer pourquoi cette mesure peut être jugée inefficace. Selon l’expérience des étudiant·es, les bénéfices sont plus grands lorsqu’ils et elles prennent leurs notes de cours, car il s’agit d’une stratégie d’apprentissage favorisant leur compréhension et leur concentration (p.269).

Pistes d’action

Les résultats de cette recherche qualitative montrent que plusieurs services de soutien et mesures d’accommodement ont une efficacité variable. Ce constat apparait préoccupant puisque les services adaptés comptent sur ces mesures pour venir en aide aux étudiant·es (p.271).

Selon les chercheuses, il est important de réaliser une évaluation approfondie de l’adaptation des ESH, afin de prendre de bonnes décisions en matière d’accommodements, de répondre à leurs besoins et de favoriser leur autonomie.

Lagacé-Leblanc, Massé et Rousseau estiment également que les établissements postsecondaires auraient intérêt à considérer d’autres approches que celle « par accommodements ». Les obstacles rencontrés par les étudiant·es ayant un TDAH peuvent être traités en adoptant les principes de conception universelle des apprentissages. De telles actions pourraient ainsi contribuer à réduire en amont le besoin d’accommodements (p.272).

Référence

Lagacé-Leblanc, J., Massé, L. et N. Rousseau (2022). Perceptions d’efficacité des services de soutien et des mesures d’accommodements des étudiants ayant un TDAH à l’éducation postsecondaire. Revue canadienne de l’éducation, 45(1), 246-278.