Dans cet article de l’Observatoire compétences-emplois (OCE) de l'Université du Québec à Montréal (UQAM), Félix Bélanger Simoneau se penche sur la notion d’«adéquation formation-emploi», une notion sur laquelle les acteurs intéressés peinent à s’entendre. Il propose quatre repères afin de mieux s’y retrouver et clarifier le débat. En introduction de son article, Bélanger Simoneau rappelle que l’adéquation formation-emploi est considérée «comme l’un des principaux défis économiques du Québec». Cela se traduit notamment par de nombreuses actions publiques en la matière. On note au passage qu’en raison de la mésentente sur la signification de la notion, le diagnostic ainsi que les actions à privilégier peuvent diverger passablement selon si on a affaire aux représentants patronaux, aux institutions d’enseignement ou au gouvernement. Pour l’auteur, nous sommes face à une notion polysémique. Il y a en effet plusieurs adéquations possibles. Les relations entre la formation et l’emploi sont plurielles et multidimensionnelles. Les correspondances entre ces deux éléments dépendent des approches théoriques, méthodologiques et pratiques.

Quatre repères pour s’y retrouver

Les quatre repères proposés par Bélanger Simoneau sont : les finalités, les niveaux (macro, méso et micro), les types d’adéquation (qualitative ou quantitative) et la mesure.

Les finalités

Il faut d’abord établir ce qu’on veut mettre en adéquation. Un nombre d’emplois à pourvoir et un nombre de diplômés? Une formation et des activités de travail? Une formation et des compétences génériques? Une formation et l’employabilité de la main-d’œuvre? Et qu’espère-t-on par cela? Augmenter la productivité, améliorer l’intégration en emploi ou développer les compétences de la main-d’œuvre?

Les niveaux

C’est une fois établies les finalités que l’on peut établir laquelle des catégories employées en sciences sociales sera pertinente. Au niveau macro, il est surtout question de combler les besoins en main-d’œuvre dans les différents secteurs économiques en fonction des prévisions.  Le gouvernement, les agences et les partenaires sont les principaux acteurs impliqués. Ils cherchent à assurer un équilibre entre les prévisions, les orientations (économiques ou sociales), le niveau de qualification de la main-d’œuvre et les dispositifs d’éducation et de perfectionnement. Au niveau méso, ce qui prime, ce sont les besoins des secteurs d’activité, des professions ou des régions. L’objectif, pour les acteurs impliqués, est de maintenir un niveau de main-d’œuvre «adéquat pour les besoins actuels et futurs des secteurs d’activités, des professions ou des régions». Pour ce qui est du niveau micro, on fait plutôt référence à des besoins de formation précis de l’entreprise ou de l’individu.

Les types d’adéquation

La perspective d’analyse à partir de laquelle on aborde l’adéquation peut être quantitative ou qualitative. Du côté quantitatif, l’adéquation renvoie à un état d’équilibre entre la quantité de main-d’œuvre formée et la quantité d’emplois disponibles. Emploi Québec et le ministère du Travail, de l’emploi et de la solidarité sociale produisent des travaux qui s’inscrivent dans cette perspective. La perspective qualitative, quand elle se concentre davantage sur le contenu de la formation et des activités de travail. Les acteurs du milieu de l’éducation et du travail s’inscrivent beaucoup dans cette catégorie. On veut mieux connaître l’effet de la formation sur le travail des employés en fonction des objectifs de formation.

La mesure

Bélanger Simoneau soutient que trois types d’évaluation permettent de préciser la façon de mesurer l’adéquation formation-emploi : statistique, normative et subjective. L’évaluation statistique de l’adéquation traite des liens entre le nombre de personnes formées et le nombre d’emplois disponibles et/ou occupés. On l’utilise pour dresser un portrait. L’évaluation normative, quant à elle, porte sur le lien entre un contenu de formation et une norme (ex. : compétence, diplôme, etc.). Il s’agit de déterminer la qualité d’une formation, d’un point de vue expert, en se basant sur les critères prédéterminés par ladite norme. Enfin, l’évaluation subjective est, comme son nom l’indique, issue du jugement des acteurs. Elle porte sur la correspondance entre une formation et un emploi. Pour l’auteur, il est non seulement possible, mais souhaitable de combiner ces types de mesure pour obtenir un diagnostic plus précis.

Deux exemples

L’auteur termine son article en exposant deux exemples où les différents repères sont employés. Le premier concerne les interventions récentes du Conseil du patronat où celui-ci affirme qu’il y a inadéquation entre les besoins de main-d’œuvre des entreprises et l’offre de formation du système scolaire. Le second exemple, pour sa part, porte plutôt sur un communiqué émis par Comité sectoriel de main-d’œuvre de la métallurgie où l’on fait une analyse normative des compétences nécessaires pour les emplois de son secteur. Bélanger Simoneau souhaite en conclusion que les repères exposés permettront aux acteurs non seulement de préciser leurs diagnostics d’adéquation ou d’inadéquation, mais de pouvoir les comparer avec ceux des autres sur une base commune.   Pour accéder directement à l’article de l’Observatoire compétences-emplois