Dans le secteur du numérique, par nécessité, la formation initiale, la formation continue sous ses différentes formes et l’alternance sont largement mobilisées. Il s'agit d'un continuum qui pourrait préfigurer une tendance plus générale dans plus d'un secteur. Les entreprises du secteur numérique doivent mettre beaucoup d’effort dans le recrutement du personnel qualifié dont elles ont besoin en raison de leur forte croissance. De plus, elles doivent s’investir tout autant dans le maintien et le renouvellement des compétences de ces travailleurs. C’est là le portrait que dresse le plus récent numéro du Bulletin de recherche emploi-formation du Céreq (No.358, 2017) sous la plume de Jean-Marie Dubois et Patrick Rousset qui se demandent s’il s’agit d’une tendance amenée à prendre de l’ampleur en France.

Soutenir la capacité d’innovation en soutenant la formation continue

Soutenir la capacité d’innovation constitue un enjeu majeur tant pour les entreprises que pour les travailleurs du secteur du numérique. Au-delà de la formation initiale, les différents types de formation continue (formels et informels) apparaissent comme une solution indispensable, mentionnent les auteurs du bulletin. Ces formations sont nécessaires pour adapter les compétences et les savoirs des salariés face à la rapidité des changements technologiques. Il devient alors intéressant de se demander comment les entreprises du numérique mobilisent les différents types de formation initiale et continue pour faire face au renouvellement des compétences.

Un nombre de diplômés insuffisant

Dubois et Rousset soulignent que le nombre de diplômés (en France) est actuellement insuffisant pour les entreprises de ce secteur d’activité. Près de 80 % de celles-ci déclarent avoir des problèmes de recrutement (contre 62 % en moyenne). Étant donné cette situation, ces entreprises sont poussées à intervenir de différentes manières dans les formations offertes dans les grandes écoles et les universités. Cela prend la forme de participation à des conférences, des séminaires ou à des conseils d’administration. Comme le mentionnent les auteurs, cette implication vise à « améliorer les contenus des diplômes » et à « les rendre plus directement adaptables à la demande ».

L’alternance, un bon levier pour répondre au besoin des entreprises

Le recours à des dispositifs de formation en alternance est de plus en plus fréquent puisqu’il est considéré comme un bon levier pour répondre aux besoins des entreprises du numérique. Celles-ci sont donc beaucoup plus nombreuses que la moyenne à recevoir des salariés « en contrat de professionnalisation ». Cela leur permet de tester les compétences et les savoir-faire des futurs travailleurs. Ces derniers peuvent également être formés à la culture de l’entreprise. Cela constitue, rappellent Dubois et Rousset, une rupture « avec le traditionnel séquençage formation initiale – vie active ».

La formation continue pour faire face aux évolutions du travail

Le problème auquel font face les entreprises du numérique est que le niveau de diplôme n’est pas nécessairement garant d’une adaptation adéquate et spontanée aux évolutions du travail et des produits. Les changements fréquents, dans le mode de fonctionnement de ces entreprises, ont pour conséquence de solliciter des compétences différentes au fil du temps. La formation en continu permet de contrer les effets négatifs liés à cette réalité. Comme dans les autres secteurs qui ont recours à ce type de formation, ce sont les cours, les stages et les formations en situation de travail auxquels ont généralement recours les entreprises du numérique. Nombre d’entre elles font cependant aussi appel à d’autres types de formation tels que l’autoformation, la participation à des séminaires et des conférences, le e-learning, etc. Les formations en ligne connaissent à cet égard beaucoup de succès (MOOC). L’importance donnée à certains domaines de formation (ex. : informatique et bureautique) s’explique, selon les auteurs, par le fait que plus de trois quarts des entreprises du secteur analysent les besoins en qualifications ou en compétences de leurs salariés. Ce taux est de 61 % en moyenne dans l’ensemble des entreprises. Dans le secteur du numérique, les employés sont davantage impliqués dans le fonctionnement de leur entreprise, que ce soit l’organisation du travail, la définition du contenu de leur activité ou la répartition du travail, par exemple. Il s’agit d’une réalité qui favorise la formation. Le recours à des formateurs internes est également une situation qui s’observe régulièrement dans ce secteur puisque les entreprises, indiquent les auteurs, « accordent une attention particulière aux processus collectifs de transmission et de mutualisation des savoirs ».

Complémentarité des modes de formation

Dubois et Rousset concluent leur texte en indiquant « qu’un changement de culture concernant l’approche du lien formation-emploi pourrait se renforcer au cours des prochaines années, notamment dans le sens d’une complémentarité entre les modes de formation formels et informels, et vers la conception d’un tissu de formations initiales et continues où l’imbrication remplacerait le séquençage ». L’harmonisation des changements de pratiques de formation pourrait devenir un enjeu majeur de la transition numérique.