La sociologue Amina Yagoubi, chercheure à la Chaire de recherche du Canada sur l’équité numérique en éducation de l’UQAM, a réalisé un rapport de recherche portant sur les inégalités numériques des jeunes Québécois.

Le document de 236 pages intitulé Cultures et inégalités numériques. Usages numériques des jeunes au Québec est publié dans un contexte d’augmentation de l’enseignement à distance mettant en lumière les inégalités numériques, notamment en éducation.

L’enquête sociologique, à la fois quantitative et qualitative, s’est déroulée dans six régions du Québec (Montréal, Abitibi-Témiscamingue, Saguenay-Lac-Saint-Jean, Capitale-Nationale, Mauricie et Estrie), où 1800 jeunes de 14 à 29 ans ont été rencontrés, en partenariat avec l’organisme Printemps numérique.

Principaux résultats

Nous regroupons ici les principaux résultats en termes d’accessibilité, de persévérance et de réussite en enseignement supérieur. Par ailleurs, le volet « réseaux sociaux et vulnérabilité » est approfondi dans le rapport.

Littératie numérique

Bien qu’ils soient consommateurs de culture et de produits numériques, les jeunes restent inégaux en matière de compétences numériques, donc de littératie numérique.

À l’école, le transfert d’un savoir-faire numérique en « capital scolaire » est difficile à réaliser. C’est ce qu’on appelle la dissonance numérique. Pourtant, cette piste d’apprentissage reste intéressante, notamment pour les jeunes vulnérables.

Yacoubi, 2020

Matériel numérique

L’enquête révèle qu’un jeune sur deux possède un ordinateur portable et que 35 % des garçons et 14 % des filles ont un ordinateur de bureau. Plus le niveau d’études des parents est élevé, plus les jeunes possèdent des équipements numériques.

Photo : Canvas

Apprentissage numérique

La moitié des jeunes interrogés utilisent le web pour se former. Ils disent être autodidactes en termes d’apprentissage numérique et apprendre davantage sur Internet, tout en déplorant le manque de cours pratiques à l’école.

Les garçons ont davantage de motivation à développer leurs compétences numériques techniques, tandis que les filles sont plus nombreuses à vouloir développer leurs compétences numériques créatives. Les garçons sont plus nombreux que les filles (44 % contre 16 %) à avoir suivi une formation en programmation.

En région, peu de jeunes sont capables de nommer des organismes ressources en médiation numérique.

Quelques recommandations

Deux univers émergent des résultats de l’enquête : celui des réseaux socionumériques des filles et celui des jeux vidéo des garçons. Selon Yagoubi, la fracture numérique genrée est un phénomène préoccupant qui pose la question de l’égalité des chances dans une société de plus en plus numérique.

Cette fracture numérique de genre demande de rester attentifs « aux nouveaux clivages sociaux et numériques afin que ne se creusent davantage d’importants fossés au sein d’une même génération ».

Yacoubi, 2020

La sociologue recommande notamment que l’éducation au numérique commence tôt afin enrayer la formation de clivages numériques genrés et de biais inconscients. Elle recommande également de rendre les offres d’enseignement en littératie numérique accessibles et d’assurer de l’accès aux populations les plus vulnérables, ainsi qu’aux régions.

Source : Yagoubi, Amina (2020). Cultures et inégalités numériques : usages numériques des jeunes au Québec. Printemps numérique : Jeunesse QC 2030, 236 pages.