Le Conseil supérieur de l’éducation (CSE) a récemment publié un avis à la ministre de l’Enseignement supérieur portant sur l’expérience éducative et les nouvelles réalités des étudiant·es du collégial.

Dans cet avis, le CSE s’intéresse à l’évolution des profils et des cheminements de la population étudiante de même qu’aux tendances sociétales et à leurs effets sur la formation collégiale. Il formule également des orientations visant à jeter les bases d’une vision pour l’avenir de la formation au collégial.

La réussite au sens large pour des étudiant·es aux profils variés

Le Conseil constate que la population étudiante présente des caractéristiques variées, tant sur le plan des caractéristiques individuelles que sur celui des cheminements, des attentes, des besoins et des objectifs de formation. Il rappelle l’importance d’adopter une vision élargie de la réussite :

« le Conseil en appelle à reconsidérer l’idée qu’il existe un « étudiant-type » et un parcours standard à emprunter par celui-ci pour réussir son projet de formation. Il considère que les parcours qui amènent ultimement les personnes à l’obtention d’un diplôme, quelle qu’en soit la nature, constituent des réussites même si elles dévient du cheminement et du délai de diplomation communément attendus d’elles au moment de leur inscription au collégial. »

(CSE, 2022, p.19)
Image : Conseil supérieur de l’éducation

Un monde en constant changement

S’appuyant sur de nombreux rapports de l’OCDE, de l’UNESCO et de la Commission internationale sur les futurs de l’éducation, le CSE brosse le portrait des tendances sociétales qui exercent une influence sur la formation.

Parmi ces tendances, le CSE s’intéresse au numérique, aux changements climatiques, aux enjeux de la mondialisation, à la participation citoyenne déclinante, à la transformation du monde du travail, aux menaces mondiales, à l’incertitude ainsi qu’aux tendances démographiques.

« La notion d’une éducation régénérée qui apprend aux individus à vivre est aussi avancée pour leur permettre d’affronter leur destin, d’être aptes à la connaissance pertinente, de mieux comprendre les complexités humaines, historiques, sociales et planétaires, d’être aptes à reconnaître l’erreur et l’illusion dans la connaissance et d’être capables de se comprendre les uns les autres (Morin, 2014). »

(CSE, 2022, p.28)

Vers une révision des finalités de la formation

L’évolution des profils des étudiant·es ainsi que les changements sociétaux exigent une révision des finalités traditionnelles de la formation :

  • Au-delà de la préparation au monde du travail par la spécialisation, le CSE rappelle l’importance d’une formation plus large, qui vise également la maîtrise de compétences générales ou transversales (p.31).
  • Le CSE met aussi l’accent sur la vision d’une éducation humaniste qui vise à « [p]ermettre à l’individu de réaliser son potentiel, et de devenir son potentiel ainsi qu’à l’amener à produire du bien-être, pour lui-même et la collectivité » (p.32).

« le Conseil estime que les formations initiales doivent également adopter des pratiques pour se situer dans cette perspective où la formation est considérée comme une composante d’un processus qui se déroule tout au long et au large de la vie et qui prépare les individus à cette continuité des apprentissages. »

(CSE, 2022, p.35)

Cette vision plus large de l’éducation amène le Conseil à préconiser une intégration formelle des compétences du 21e siècle à la formation collégiale et à considérer le développement de la culture générale et l’interdisciplinarité en tant que composantes essentielles de cette formation.

Le potentiel de la flexibilité de la formation

Le CSE s’intéresse également à la flexibilité de la formation et à ses effets positifs sur l’accès aux études. Selon une approche globale, telle que décrite dans le cadre de référence de la Higher Education Academy (2015), cette flexibilité concerne le mode d’apprentissage, le contenu des programmes, le moment et le rythme des apprentissages ainsi que les lieux d’enseignement (p.67).

Cette flexibilité a le potentiel de :

  • faciliter l’adaptation aux réalités et aux besoins des étudiant·es ;
  • offrir davantage d’opportunités aux personnes en emploi de réintégrer l’enseignement supérieur ;
  • favoriser l’adéquation des compétences acquises et des besoins des milieux de travail. (p.69)

Par ailleurs, le mouvement vers la flexibilité étant déjà en cours, le CSE soutient que les établissements collégiaux doivent bénéficier de soutien pour opérationnaliser cette flexibilité, tant à l’échelle des cours, qu’à l’échelle organisationnelle et des programmes.

« Un cadre réglementaire ou une stratégie nationale peut par exemple établir des normes et des lignes directrices et fournir des ressources financières pour aider les établissements d’enseignement à intégrer des options d’apprentissage flexible dans leurs programmes d’études… »

(Martin et Godonoga, 2020 dans CSE, 2022, p.69)

Le cadre actuel de la formation collégiale

La quatrième partie de l’avis porte sur le cadre actuel de la formation collégiale et sur l’organisation des études.

Le CSE déplore que les programmes d’études soient devenus de plus en plus rigides, limitant ainsi les possibilités d’exploration pour les étudiant·es dont le projet d’études reste à définir. Le Conseil remarque également que les compétences communes devraient être révisées pour être assorties d’objectifs d’enseignement et d’évaluation. Ces compétences communes devraient aussi mieux intégrer les compétences requises aujourd’hui, notamment celles du 21e siècle.

Les plans stratégiques des cégeps du Québec

La section suivante de l’avis présente les résultats de l’analyse de contenu des plans stratégiques des 48 cégeps du Québec.

« Le Conseil conclut que les collèges sont à l’affût des éléments essentiels d’une formation tournée vers l’avenir, bien que leurs plans stratégiques ne reflètent que timidement un engagement sur la voie de la flexibilité de la formation. »

(CSE, 2022, p.113)

L’avis se termine avec la présentation de cinq orientations et 22 recommandations. Ces orientations tiennent compte des nouveaux besoins de formation, notamment en matière de flexibilité, afin de mieux répondre aux réalités des étudiant·es dont les profils varient :

  1. Actualiser les représentations des cheminements étudiants et de la réussite au collégial (p.115)
  2. Répondre aux besoins de la société et des personnes par des apprentissages pertinents et durables (p.117)
  3. Accroître les options de flexibilité de la formation à différents niveaux d’intervention (p.120)
  4. Optimiser le déploiement de la formation collégiale (p.122)
  5. Accompagner l’étudiante et l’étudiant dans le développement de l’autonomie nécessaire à sa responsabilisation éclairée dans la définition et la réussite de son projet de formation (p.124)

Référence

Conseil supérieur de l’éducation (2021). Formation collégiale : expérience éducative et nouvelles réalités, Le Conseil, 192 p.