Le professeur-chercheur en sciences de l’éducation Pierre Canisius Kamanzi (Université de Montréal) a récemment publié un article portant sur les parcours des jeunes Montréalais d’origine immigrante aux études supérieures.

Publié dans la revue brésilienne Educação & Sociedade du Centro de Estudos Educação e Sociedade (CEDES) situé à Campinas, au Brésil, l’article fait état d’une recherche subventionnée qui s’appuie sur les données publiques du Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur du Québec. Il vise principalement à examiner dans quelle mesure les jeunes Canadiens d’origine immigrante vivant à Montréal ont des parcours linéaires et non linéaires aux études supérieures.

Les parcours non-linéaires sont ici entendus comme des parcours « caractérisés par bifurcations combinant souvent des programmes de formation professionnelle et générale » (Kamanzi, 2019).

De plus, le terme « études supérieures » est entendu dans cet article comme « études postsecondaires »

Principaux résultats

Variation selon l’origine des parents

Après les études secondaires, la majorité des jeunes poursuivent des études au cégep ou à l’université ; à l’âge de 22 ans, deux tiers (65 %) des jeunes dont les parents résident dans la région de Montréal ont fréquenté, à un moment ou à un autre, un cégep (34 %) ou une université (31 %).

Le taux de fréquentation des établissements postsecondaires est cependant plus élevé chez les jeunes issus de familles originaires d’Asie orientale (80 %), d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient (74 %), et relativement moins élevé chez ceux d’Amérique latine et des Caraïbes (58 %).

Type de parcours emprunté

Les jeunes d’origine immigrante poursuivent des études au cégep et à l’université par la voie des parcours linéaires dans une proportion plus élevée que leurs pairs dont les parents sont nés au Canada.

De plus, les différences sont nettement plus élevées à l’université qu’au cégep ; les étudiants d’origine immigrante s’inscrivent davantage dans les parcours linéaires jusqu’à l’université, à l’exception de ceux d’origine latino-américaine et caribéenne.

Image : Pixabay

Différences entre les étudiants d’origine immigrante

L’étude de Kamanzi montre qu’il existe des différences significatives élevées parmi les étudiants d’origine immigrante. En effet, l’accès aux études supérieures et les parcours scolaires varient selon l’origine géographique des parents et selon que l’étudiant est un immigrant de 1ère ou de 2e génération.

Plus précisément, les immigrants de 2e génération originaires d’Asie orientale et dans une moindre mesure, ceux d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient sont nettement plus susceptibles que les autres d’accéder aux études supérieures et de suivre les parcours linéaires jusqu’à l’université.

À l’inverse, les immigrants d’origine latino-américaine et caribéenne, qu’ils soient de 1ère ou de 2e génération, sont les moins susceptibles d’accéder aux études supérieures par la voie des parcours linéaires.

Selon Kamanzi, malgré des différences d’accès aux études supérieures, le type de parcours scolaires tend à être similaire entre les immigrants lorsqu’on tient compte des antécédents scolaires au secondaire : ils ont en commun la tendance avoir des parcours linéaires lorsqu’ils ont un bon dossier scolaire.

L’exception canadienne

Alors que les recherches à l’échelle internationale reconnaissent les ségrégations dont les immigrants font l’objet, l’auteur avance trois hypothèses pour expliquer la présence des jeunes issus de l’immigration dans les établissements postsecondaires au Canada.

Premièrement, ces jeunes – mais aussi et surtout leurs parents – consacrent beaucoup de ressources, souvent au prix de grands sacrifices qui dépassent leurs moyens, pour scolariser leurs enfants jusqu’aux études supérieures.

Deuxièmement, les aspirations des jeunes immigrants canadiens se conjuguent à la qualité des parcours scolaires au primaire et au secondaire. Au Canada, les élèves issus des familles immigrantes et leurs pairs issus des familles d’ici ont des résultats scolaires comparables.

Enfin, troisièmement, les politiques canadiennes d’immigration se distinguent par des mesures d’intégration des immigrants. D’une part, des ressources supplémentaires sont allouées au soutien à leur intégration. D’autre part, le Canada fait partie des pays qui sélectionnent davantage les immigrants en fonction de leur capital scolaire et économique. On peut donc penser que les parents de ces étudiants seraient eux-mêmes détenteurs de diplômes d’études postsecondaires.

Source : Kamanzi, P.C. (2019). Les parcours scolaires des jeunes Canadiens d’origine immigrante aux études supérieures : qui y accède et comment ? Educ. Soc., Campinas, 40.