La revue Distances et Médiations des savoirs publie un article présentant le cas d’un établissement d’enseignement où les tuteurs des cours offerts à distance, contrairement à la pratique courante, ont été impliqués d’une quelconque façon dans la conception du cours. Des défis à cet égard subsistent toutefois. Poellhuber, Chomienne, Michelot et Fortin, les auteurs de la recherche qualitative présentée soutiennent qu’avec l’évolution récente des technologies employées en formation à distance (FAD), la qualité des cours et la réussite des étudiants appellent à une collaboration plus étroite entre les équipes de conception et d’encadrement. Dans leur article, qui se base sur l’un des quatre cas au cœur de leur étude, les auteurs présentent le rôle des tuteurs tel que perçu par les autres acteurs de l’établissement d’enseignement à distance ciblé. Leur but, en faisant cela, est de mieux comprendre l’état de la coopération entre les différentes équipes impliquées dans la conception de cours. Selon eux, il y aurait un écart entre le rôle attendu des tuteurs et le travail qu’ils effectuent réellement. L’établissement faisant l’objet de l’article est complètement dédié à la FAD (plus de 300 cours offerts). Il offre à la fois des programmes réguliers et de la formation continue. Sur le plan de la coopération, il s’agit d’un établissement qui présente des problèmes entre équipes de conception et d’encadrement.

Le cadre conceptuel

Les auteurs basent leur recherche sur la théorie de l’échange social et le modèle de coopération professionnelle de Saint-Arnaud, lesquels présentent plusieurs points en commun ce qui permettent de les combiner plus aisément et efficacement. La théorie de l’échange social « conceptualise les relations sociales comme un processus d’échange qui peut être réciproque ou déséquilibré ». De son côté, le modèle de Saint-Arnaud porte sur « les relations qu’entretiennent les professionnels entre eux et avec des clients ».

La méthodologie

L’article est basé sur une recherche qualitative, laquelle fait place à la narration et à l’interprétation des acteurs eux-mêmes. La collecte de données s’est effectuée en trois étapes. Il y a d’abord eu des entretiens semi-dirigés d’environ 45 minutes auprès de six tuteurs, quatre conseillers pédagogiques de l’équipe de conception et deux cadres responsables des politiques pédagogiques (CP) et administratives (responsables administratifs). La même grille d’entretien a été utilisée pour chacun des groupes. Une fois une première analyse effectuée, celle-ci a été présentée pour validation à la communauté des acteurs des services de conception et de diffusion. Cela a permis de faire ressortir des points à approfondir lors de la 3e étape qui a pris la forme de deux entrevues de groupe (CP et tuteurs).

Les thèmes abordés

Les thèmes qui ont été abordés lors des entretiens individuels et de groupe sont :
  • l’organisation du travail,
  • le rôle de chacun,
  • la collaboration entre équipes,
  • la communication,
  • les relations entre équipes de conception et d’encadrement, et
  • la reconnaissance du travail de chacun.

Résultats

Les auteurs de l’article indiquent qu’un écart important existe toujours entre le rôle qui est officiellement attribué aux tuteurs et celui qu’ils assument réellement. Les différentes perceptions sont également marquées par des écarts notables. Les auteurs poursuivent leur analyse en disant qu’à bien des égards, l’organisation du travail dans l’établissement étudié relève encore d’un modèle industriel de la FAD où les services travaillent séparément. En cela, il s’agit d’un cas typique de plusieurs établissements de FAD « qui se retrouvent face à l’échec relatif d’une définition trop limitative du rôle des tuteurs dans une organisation du travail ». Ce modèle n’est ni optimale pour l’amélioration de la qualité des cours et la réussite étudiante, ni pour la reconnaissance du travail des tuteurs. Le manque d’accès à l’autre semble un élément central expliquant le dysfonctionnement observé. Des mesures ont été prises par l’établissement étudié afin de favoriser la coopération entre les deux groupes professionnels. Néanmoins, dans l’ensemble, les tuteurs espèrent toujours obtenir davantage de reconnaissance, notamment en étant plus impliqués dans la conception des cours. Les auteurs notent d’ailleurs que lorsque la relation devient plus directe entre tuteurs et CP, une collaboration plus significative ainsi qu’une relation plus équilibrée apparaissent. Poellhuber, Chomienne, Michelot et Fortin concluent en rappelant que, malgré les progrès observés, de nombreux défis subsistent dans cet établissement. Parmi les plus importants, ils notent :
  • L’implantation de grilles d’évaluation dans une perspective d’approche par compétences
  • Le développement d’une compréhension mutuelle du rôle de chacun
  • L’établissement d’une véritable coopération entre tuteurs et CP (nature des rapports de coopération)
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