Le dernier numéro de la revue Médiations et médiatisations offre un aperçu des usages et de la recherche sur le numérique en contexte africain.

Intitulé L’éducation numérique en Afrique : usages et perspectives, ce numéro réalisé sous la responsabilité de Lionel Roche (Université du Québec à Montréal), Judicaël Alladatin (Université Mohammed VI Polytechnique, Maroc) et Florian Meyer (Université de Sherbrooke) regroupe sept articles abordant divers aspects de l’éducation numérique en Afrique. L’ORES résume deux de ces articles.

Les conditions de l’efficacité de la FAD en Afrique

Faustin Kagorora (Université de Montréal), Valéry Psyché (Université TÉLUQ) et Francisco A. Loiola (Université de Montréal) présentent un État des lieux des conditions d’efficacité de la formation à distance en enseignement supérieur en Afrique.

Dans le cadre d’une recension des écrits, l’équipe de recherche a analysé douze études portant sur les conditions d’efficacité de la FAD en Afrique. Par cette analyse, l’équipe a identifié les dix conditions d’efficacité les plus couramment nommées dans les études (p.35-36) :

  • La qualité d’accès à Internet ;
  • L’infrastructure et les équipements technologiques ;
  • La facilité d’utilisation perçue des outils d’apprentissage ;
  • Les interactions (avec le contenu, la personne enseignante, les autres étudiants et étudiantes et avec le système) ;
  • Les compétences technopédagogiques des étudiants et étudiantes ;
  • Les compétences technopédagogiques des enseignants et enseignantes ;
  • L’utilité perçue ;
  • La qualité du contenu ;
  • Le soutien technique et pédagogique aux personnes apprenantes ;
  • Le soutien technique au personnel enseignant.

Kagorora, Psyché et Loiola observent que les conditions d’efficacité de la FAD relevées dans ces études sont similaires à celles identifiées dans des pays comme le Canada et les États-Unis.

« Bien que certaines conditions d’efficacité de la FAD puissent différer d’un pays à l’autre, les résultats de notre analyse indiquent que d’autres, comme l’infrastructure et l’équipement technologiques, la qualité d’accès à Internet et les compétences technopédagogiques (des enseignants et des étudiants), sont communes. Nous croyons donc que cette étude pourrait servir de base à une analyse plus approfondie et à l’élaboration d’un modèle d’efficacité de la FAD du contexte local en Afrique, c’est-à-dire du contexte dans lequel une FAD doit être dispensée.

(Kagorora, Psyché et Loiola, 2023, p.43)

Des stratégies sont ensuite proposées pour réduire les principaux obstacles à l’implantation de la FAD en Afrique, soit les problèmes liés aux infrastructures, aux équipements technologiques et au contenu des cours.

Les besoins étudiants en matière de FAD

La conseillère pédagogique Mada Lucienne Tendeng (Université Laval) s’intéresse à la prise en compte des besoins étudiants dans le modèle d’enseignement de l’Université virtuelle du Sénégal (UVS). Son article, intitulé Usages et non usages du numérique dans le modèle pédagogique de formation à distance de l’Université virtuelle du Sénégal, offre quelques pistes pour mieux comprendre les enjeux de participation étudiante.

Mada Lucienne Tendeng explique que les étudiants et étudiantes de l’UVS sont peu engagés dans leurs études :

« Si près de 80 % des étudiants officiellement admis à un cours de l’UVS ne s’investissent pas effectivement dans leurs études, n’y mettent pas le temps et les efforts nécessaires, on fait face à l’un ou l’autre de ces besoins ou insatisfactions :

  • un manque d’intérêt des étudiants pour le type de formation proposé ;
  • une faible perception de l’efficacité des stratégies pédagogiques ;
  • une faible perception de l’accessibilité, de l’efficacité et de l’utilité des connaissances enseignées ;
  • une absence pour cause d’occupation dans une formation parallèle en mode présentiel ;
  • un défaut d’équipement nécessaire à la formation : ordinateur, connectivité à Internet, électricité… ;
  • un manque d’engagement, une démotivation, un abandon… » (Tendeng, 2023, p.116)

La conseillère pédagogique explique que le modèle de formation offert à l’UVS correspond à un modèle « hybride en ligne » (p.117), dans lequel le matériel didactique est accessible dès le début du semestre, et doit permettre une autoformation soutenue par des séances virtuelles avec une personne tutrice.

Or, ce modèle comporte des limites nuisant à l’engagement et à la motivation étudiante, notamment le manque de flexibilité, le peu d’échanges et d’interactions ou encore l’absence d’occasions d’apprentissage actif ou de co-construction de connaissances.

« L’enjeu est ici de susciter une réelle activité d’apprentissage, en apprentissage individuel ou collaboratif, source d’apprentissage durable et d’engagement. Dans une même séquence de cours et sur tout le semestre, cela pourrait passer par une variété de méthodes pédagogiques : des ateliers, des lectures collectives, des lectures guidées individuelles, des études de cas, des jeux de rôles… »

(Tendeng, 2023, p.118)

La conseillère pédagogique estime que ces enjeux devraient être davantage pris en compte par l’UVS pour mieux intégrer les volets humains et sociaux dans ses activités, afin de soutenir la motivation et l’autonomie des étudiants et étudiantes.

Références

Tendeng, M. L. (2023). Usages et non usages du numérique dans le modèle pédagogique de formation à distance de l’Université virtuelle du Sénégal : Tensions entre caractéristiques du public étudiant, vision de l’éducation et ressources. Médiations et médiatisations, (14), 114-123. https://doi.org/10.52358/mm.vi14.316

Kagorora, F., Psyché, V., et A. Loiola, F. (2023). État des lieux des conditions d’efficacité de la formation à distance en enseignement supérieur en Afrique. Médiations et médiatisations, (14), 28-45. https://doi.org/10.52358/mm.vi14.318