Des chercheur·euses de l'Université de l’Indiana et de l'Université d’Auburn aux États-Unis ont mesuré les perceptions de collégien·nes de la communauté LGBQ+ au regard de trois dimensions de leurs expériences universitaires : le sentiment d'appartenance à leur université, l'engagement institutionnel de l’université à leur égard et le dévoilement de leur identité sexuelle.

L’article « The Within-Group Differences in LGBQ+ College Students’ Belongingness, Institutional Commitment, and Outness », publié dans le plus récent numéro de la revue Journal of Diversity in Higher Education, présente les résultats d’une analyse quantitative effectuée par les chercheur·euses A. BrckaLorenz, A. Duran, K. Fassett et D. Palmer.

Cadre conceptuel et méthodologie

Le modèle des dimensions multiples de l’identité (The Model of Multiple Dimensions of Identity – MMDI : Jones & McEwen, 2000) est privilégié par les chercheur·euses.

« Le MMDI soutient que les identités sociales des étudiant·es doivent être comprises en relation et ne doivent pas être explorées de façon isolée. » (traduction libre)

BrckaLorenz et al., p. 137

Leur recherche se distingue par une analyse quantitative croisée de l’identité sexuelle (gai·e/lesbienne, bisexuel·le ou queer) et des identités raciales/ethniques au sein de la communauté LGBQ+.

L’équipe de recherche a analysé les réponses de 14 000 étudiant·es aux questionnaires du National Survey of Student Engagement (NSSE) de 2017 aux États-Unis.

Trois catégories sous la loupe

Selon les chercheur·euses, le sentiment d’appartenance, le dévoilement ou non de l’identité sexuelle et l’engagement institutionnel envers les membres de la communauté LGBQ+ sont directement liés à la rétention scolaire de ces étudiant·es. Alors que le sentiment d’appartenance et le dévoilement de l’identité sexuelle ne sont pas définis dans l’article, les auteur·trices précisent le sens de l’engagement institutionnel :

« […] un concept qui mesure la perception qu’ont les étudiant·es du degré de dévouement des collèges et des universités à leur réussite et à leur bien-être ». (traduction libre)

Hausmann et al., 2007, cité dans BrckaLorenz et al., p. 136

Principaux résultats

Les résultats de l’analyse révèlent que les perceptions étudiantes au regard des trois dimensions sondées diffèrent selon les identités sexuelles et raciales/ethniques.

Les étudiant·es bisexuel·les ont un sentiment d’appartenance supérieur à la moyenne des étudiant·es ayant d’autres orientations sexuelles.

Les étudiant·es bisexuel·les et ceux et celles s’identifiant à une autre orientation sexuelle ont ressenti un plus grand engagement de leur établissement pour le bien-être des personnes LGBQ+ que l’ensemble des étudiant·es sondé·es.

« De même, les étudiant·es qui s’identifient comme queer ont obtenu des résultats plus faibles en matière d’engagement institutionnel, ce qui indique qu’ils ne reçoivent pas un soutien significatif pour leur identité. »

BrckaLorenz et al., p. 139-140

Quant au dévoilement de l’identité sexuelle, les étudiant·es qui s’identifient comme gai·es, en questionnement ou incertain·es de leur identité sexuelle, ou encore d’une autre orientation sexuelle dévoilent moins celle-ci que d’autres étudiant·es sondé·es.

Image : Canva

En accord avec le modèle MMDI évoqué précédemment, les résultats de la recherche confirment que les « identités sociales multiples » des membres de la communauté LGBQ+ doivent être abordées d’une manière croisée.

Pistes de recherche et d’action

Selon l’équipe de recherche, adapter les services offerts aux étudiant·es en fonction de leurs diversités sexuelles et raciales/ethniques démontrerait aux membres de la communauté LGBQ+ leur importance au sein de leur établissement.

Selon les chercheur·euses, les services institutionnels offerts à la communauté étudiante doivent être améliorés afin de mieux intégrer et accueillir la communauté LGBQ+ dans sa diversité. Pour favoriser l’inclusion, ils·elles suggèrent de :

1. embaucher des spécialistes de la conception de matériel pédagogique issus de la communauté LGBQ+ de couleur;

2. nommer des lieux communs du campus d’après des figures importantes de cette communauté;

3. créer plus de postes en soutien à cette communauté;

4. favoriser le dialogue avec la communauté LGBQ+ sur le sujet du dévoilement, grâce à des panels, des conférencier·ères et des projections de films. (traduction libre)

BrckaLorenz et al., p. 144

De plus, les centres dédiés au soutien de la communauté étudiante devraient créer des programmes et des ressources spécifiques pour les étudiant·es qui s’identifient à des identités croisées (sexuelles et raciales/ethniques). La création de tels programmes sur mesure permettrait de combattre les discriminations systémiques vécues par les membres racisé·es de la communauté LGBQ+, par exemple.

À la lumière de cette recherche, ce serait donc une erreur de concevoir des programmes et des services monolithiques destinés à une communauté LGBQ+ qui se révèle diversifiée et complexe.

Référence : BrckaLorenz, A., Duran, A., Fassett, K., et Palmer, D. (2021). The within-group differences in LGBQ+ college students’ belongingness, institutional commitment, and outness. Journal of Diversity in Higher Education, 14(1), 135–146.

Hausmann, L. R. M. et al. (2007). Sense of belonging as a predictor of intentions to persist among African American and White first-year college students. Research in Higher Education, 48, 803–839.

Jones, S. R., et McEwen, M. K. (2000). A conceptual model of multiple dimensions of identity. Journal of College Student Development, 41, 405–414.