Deux chercheuses de l’University of North Carolina (États-Unis) ont examiné les perceptions d’étudiants et d’étudiantes de première génération (EPG) à propos du soutien parental, du détachement émotionnel des parents et de l’adaptation à l’université.

Grace Y. Lee and Anne C. Fletcher ont publié les résultats de leur recherche dans l’article intitulé Emotional Detachment Moderates Associations Between Students’ Perceptions of Parental Support and First-Year College Adjustment : Generational Status Differences, paru dans Journal of College Student Retention: Research, Theory & Practice.

L’article vise notamment à déterminer l’influence :

  • du soutien parental (scolaire et social) sur l’adaptation à l’université;
  • du détachement affectif envers les parents sur l’adaptation à l’université.

Pour ce faire, les chercheuses ont interrogé par questionnaire 384 personnes étudiantes de première année d’une grande université publique de premier cycle (college américain). Ces étudiantes et étudiants âgés de 18 à 20 ans étaient majoritairement d’origine caucasienne (39 %) ou afro-américaine (37 %). De plus, 80 % vivaient hors du domicile familial (75 % sur le campus, 5 % hors campus).

(Lee et Fletcher, 2023, p.1007)

Principaux résultats

De manière générale, un fort soutien social de la part des parents est associé à une forte adaptation des EPG, ainsi qu’à un fort sentiment d’appartenance institutionnel. Par ailleurs, le soutien scolaire parental n’est pas associé à une meilleure adaptation à l’université.

De plus, les résultats de cette recherche montrent qu’un fort détachement émotionnel des EPG envers leurs parents est lié à un fort sentiment d’appartenance à l’institution fréquentée (p.1019).

Les effets du soutien parental et du détachement affectif

Le fait qu’un fort soutien social parental soit lié à une adaptation positive à l’université, mais qu’un soutien scolaire parental n’y soit pas associé confirme les conclusions de recherches précédentes (ibid.). En effet, certaines recherches ont montré que le soutien social parental est lié positivement au sentiment d’auto-efficacité (Nicpon et al., 2006) ou encore à un réseau social « positif » (Mounts et al., 2006).

Quatres personnes étudiantes marchant dans la rue.
Image : Canva

Selon Lee et Fletcher (2023), l’une des raisons pour lesquelles le soutien scolaire des parents influence peu l’adaptation à l’université réside dans l’effet d’éloignement. En effet, le soutien scolaire nécessite une présence physique plus importante que le soutien social qui peut être fourni par le biais des technologies lorsque la personne étudiante vit hors du domicile familial (p.1019).

Un autre résultat notable de cette recherche concerne le niveau de détachement affectif face aux parents : plus la personne étudiante affirme être détachée émotionnellement de ses parents, plus elle possède un fort sentiment d’appartenance envers l’institution qu’elle fréquente (ibid.).

Selon les chercheuses, il est possible que les étudiants et les étudiantes qui sont plus autonomes affectivement par rapport à leurs parents soient plus à l’aise de s’engager à l’université, ce qui leur permet de s’attacher à l’établissement et aux personnes qui y travaillent. Il est également possible que ceux et celles qui sont plus autonomes sur le plan affectif fréquentent un établissement faisant partie de leurs premiers choix personnels, ce qui les amène à s’engager davantage (ibid.).

Du soutien parental, mais pas de contrôle

Il a été documenté que les parents des EPG manquent de connaissances personnelles sur l’environnement universitaire. Les EPG perçoivent, de manière générale, des niveaux de soutien parental inférieurs à ceux des étudiants et des étudiantes de deuxième et de troisième génération (Sy et al., 2011).

Plusieurs EPG entrent à l’université sans comprendre le fonctionnement du système d’enseignement supérieur et sont confrontés à des défis qui entravent leur réussite (p.1020).

Par ailleurs, lorsque les EPG sont proches de leurs parents, il leur est plus facile de discuter des expériences stressantes liées à la transition vers l’université, et ce, même si leurs parents ne l’ont pas vécue. En effet, le fait que les parents soient conscients des préoccupations de leurs enfants et qu’ils essaient de les aider à gérer leurs émotions est peut-être plus important que leur niveau de connaissances sur l’université (p.1020).

À l’inverse, lorsque les EPG sont détachés émotionnellement de leurs parents, les efforts de ces derniers pour les soutenir peuvent être perçus comme une pression plutôt qu’un soutien, ce qui risque de créer un stress supplémentaire d’entraver la réussite (ibid.).

De leur côté, les étudiants et les étudiantes de deuxième et de troisième génération abordent la transition vers l’université avec plus de confiance que les EPG, et leurs parents peuvent promouvoir l’indépendance en raison de leur propre expérience de l’université et de l’obtention d’un diplôme. La transition vers l’université est plus facile en raison de la préparation préalable fournie par les parents ou parce qu’ils savent qu’un support parental existe — qu’il soit utilisé ou non (p.1021).

Les chercheuses rappellent que le soutien social des parents est important et bénéfique pour toutes les personnes étudiantes, quel que soit le statut générationnel (p.1020).

Retombées pour l’aide à la réussite

Les résultats de cette recherche peuvent être utiles au personnel professionnel et aux gestionnaires des établissements d’enseignement supérieur. Les initiatives les plus efficaces pour soutenir la réussite étudiante devraient reconnaître l’importance du soutien parental, du détachement émotionnel de la personne étudiante et de son statut générationnel (p.1022).

Selon les chercheuses, plutôt que de supposer qu’un fort soutien parental est nécessaire pour s’adapter à l’université, il est important de considérer le type de soutien, de même que les parcours et les caractéristiques des personnes étudiantes (ibid.).

Références

Lee, G. Y., et Fletcher, A. C. (2023). Emotional Detachment Moderates Associations Between Students’ Perceptions of Parental Support and First-Year College Adjustment: Generational Status DifferencesJournal of College Student Retention: Research, Theory & Practice24(4), 1002–1027. 

Mounts N. S., Valentiner D. P., Anderson K. L., Boswell M. K. (2006). Shyness, sociability, and parental support for the college transition: Relation to adolescents’ adjustment. Journal of Youth and Adolescence, 35(1), 68–77. 

Nicpon M. F., Huser L., Blanks E. H., Sollenberger S., Befort C., Kurpius S. E. R. (2006). The relationship of loneliness and social support with college freshmen’s academic performance and persistenceJournal of College Student Retention: Research, Theory & Practice, 8(3), 345–358. 

Sy S. R., Fong K., Carter R., Boehme J., Alpert A. (2011). Parent support and stress among first-generation and continuing-generation female students during the transition to collegeJournal of College Student Retention: Research, Theory & Practice, 13(3), 383–398.